Camp d'été d'alpinisme dans les Ecrins

juillet 2015


Camp d’été 2015 …

Quelque part sur les hauteurs d’Ailefroide

Mémoires d’une « bizut »

« Il est 3h 15 ! » la voix du gardien réveille le dortoir qui s’anime en silence à la lueur des frontales. Une heure après, nous quittons le refuge du Sélé avec des températures incroyablement douces à 2511 m. Comme je suis la seule « bizut » parmi les 19 CAFistes, je suis à la fois ravie et un peu inquiète de ce qui va être ma 1ère journée d’alpinisme : bien résolue à ne pas me laisser distancer, je marche dans les pas d’Alain, chef de cordée et en prime chef de course. Heureusement, le rythme de départ assez lent permet au corps de se réveiller doucement et le spectacle sous la voûte étoilée est féerique… Je ne saisis pas tout de suite l’inquiétude des marcheurs de tête qui cherchent dans l’obscurité comment rejoindre l’Ailefroide orientale : l'été caniculaire et la fonte des glaciers nous compliquent un peu la tâche. Après avoir escaladé la roche, un peu de désescalade pimente le parcours avant de pouvoir enfin trouver du blanc ... Je suis attentive à la moindre consigne et bien attachée par mon baudrier, je progresse en confiance tandis que mes 2 compagnons plus expérimentés avancent eux sans difficulté… Faisant la même taille que Valérie, j’essaie de mettre mes pieds au même endroit et d’utiliser les mêmes prises qu’elle surtout quand la montagne se redresse et ça marche ! Arrivée au glacier, je chausse les crampons pour la première fois (le pied gauche à droite d’ailleurs avant de lire « right » sur le crampon restant:/) Quel bonheur de marcher dans la neige en plein mois de Juillet ! 

Malgré l’apparente facilité de la ballade, Alain me répète discrètement « corde tendue » car le danger insoupçonné des crevasses demeure.

De retour au refuge du Sélé vers 16h, je m’aperçois avec soulagement que mes pieds échauffés dans mes chaussures d’alpi. presque neuves ont résisté : zéro ampoule ! Certains ont eu moins de chance et sortent Compeed et Elasto. Tandis que tout le monde se détend avec une pause bière/lessive/toilette/étirement devant le bac abreuvoir. Après un bon civet de chamois, personne ne traîne pour aller au lit en vue du glacier noir.

Le lendemain, notre chemin parsemé de pousses de génépi nous amène au col du Sélé pour redescendre par le glacier de la Pilate. Pour atteindre le refuge de la Pilatte, je parcours ma 1ère via ferrata puisque l’accès se fait par des échelles mais, comme au CAF 88 on ne fait pas les choses à moitié, on y laisse les autres alpinistes dans les transats avec vue sur le glacier et nous, on poursuit jusqu’au refuge de Temple Ecrins.


Le paysage est grandiose avec un torrent de fonte blanc gris où j’aurais bien trempé mes pieds mais je préfère suivre le groupe et attaque un petit raidillon rendu plus sévère par la fatigue et la chaleur... . L’ambiance conviviale au sommet de Temple Ecrins fait oublier la fatigue du jour et ceux qui sont là depuis déjà de nombreuses minutes savourent une bière, trempent dans l’eau froide du béquet et félicitent ceux qui ont mis un peu plus de temps : c’est aussi ça l’esprit CAF et c’est bien appréciable, quand on débute, de profiter de l’expertise des plus aguerris qui vous donnent discrètement les bons conseils sans vous écraser de leur niveau… Ce soir c’est le 14 Juillet mais après avoir rangé les cordes et autres affaires pleines de sueur qui pourraient attirer les marmottes, pas de bal pour nous ce soir et à 8 h tout le monde au lit ! Se lever à 3 h du matin, marcher pendant 12H en espérant avoir assez d’eau, se laver à l’eau froide et se coucher à 20h pour recommencer le lendemain : vu de l’extérieur c’est un truc de maso. Et pourtant ça fait tellement du bien de se recentrer sur l’essentiel après une année de boulot ! Le corps s’habitue à ce rythme tellement différent de ma vie citadine et tous les tracas du quotidien sont restés en bas dans la vallée car ici Dieu merci, y a pas de réseau.



Après une nouvelle marche d’approche et une partie d’escalade, je vois ce que je crois être le pic alors que nous ne sommes encore qu’à l’antécime. Alain s’amuse de mon enthousiasme une fois en haut et de ma déception quand je comprends qu’on n’est pas au bout… Même si c’est une cotation F, «  ça envoie du gaz » pour atteindre les derniers mètres mais une fois en haut à 3775 m , quel bonheur ! Du coup, la fiole de génépi circule et contribue à la bonne ambiance générale. La descente par le col de la Temple est moins agréable car la roche s’effrite sous nos pieds… Nous arrivons au glacier noir et apprécions la beauté du paysage tout en restant méfiant sur la neige molle dont la fonte alimente crevasses et moulins.

Christophe a vu son bâton disparaître dans une crevasse et on devine qu’en dessous de nos pieds se trouve un labyrinthe d’eau et de glace. Pour finir nous devrons encore franchir une grande partie de moraines où j’ai du mal à repérer les cairns dans ce paysage lunaire…

Enfin nous trouvons le chemin de crête indiqué par les topo guides et nous dévalons vers le Pré de Mme Karl : la tête marche si vite que je peine à les suivre… Valérie et Julien doivent être pressés de retrouver leur moitié qui les attend au camping… à moins que ce soit la perspective d’une boisson fraîche au refuge. Là encore tout le monde arrive en ordre dispersé et Alain et Isabelle ferment la marche pour s’assurer que tout le monde est sorti de cette vallée infernale de cailloux. Le repos de demain sera le bienvenu et je compte bien ne RIEN faire… Un repas convivial avec pizza et légumes enchantent tout le monde et pour une fois on traîne un peu le soir.

Le jeudi, Emeline et Francis au contraire ont prévu de faire une grande voie d’escalade tandis que certains vont faire « de la couenne » puisque c’est comme cela qu’on appelle les zones écoles très fréquentées… D’autres encore vont acheter de quoi panser les plaies ou du matériel pour mieux repartir. Ailefroide n’a jamais aussi mal porté son nom et nous nous réveillons comme tous les matins sans aucune trace de rosée et après une grasse matinée bien agréable. Après plusieurs heures de marche et quelques fruits secs, le comté de la fruitière et le saucisson est un vrai festin car le petit déjeuner du refuge était vraiment frugal.



Alain fait un point avec ses cadres : la menace des orages doublée d’une rimaye compliquée sur le massif des écrins l’amène à changer le programme qui sera écourté d’un jour. Nous n’irons pas au refuge des Ecrins mais ce n’est pas si grave car je compte bien revenir et faire un jour cette course mythique présentée dans le livre de Gaston Rebuffat (même si les photos des décennies passées montrent que la fonte est indéniable et inquiétante). Nous repartons vendredi après-midi pour le refuge du glacier blanc : marche d’approche agréable et facile avec un refuge très fréquenté qui accueille aussi des familles… Gérard agrémente la marche de quelques informations sur les silènes acaules ou autres curiosités géologiques.

Le lendemain matin, la montée au dessus du refuge est par contre difficile car on glisse dans la moraine et le rythme de tête est au moins à 500m/heure. Heureusement Alain et Isabelle temporisent pour permettre aux Diesels de rejoindre les plus rapides et tout le monde se retrouve pour partager un lever de soleil magique sur la tête des Agneaux. Du col, on voit ce fameux dôme des Ecrins et son arête magnifique ; nous profitons ensemble de ce panorama grandiose à 360° mais je ne suis d’ailleurs pas au bout de mes peines car le sommet de la tête des agneaux se mérite et demande un peu de courage pour les derniers 100 mètres qui sont bien raides. Certaines cordées hésitent… je grimpe, assurée bien sec par Alain sur ce passage et on redescend en rappel après avoir remis une cordelette toute neuve pour sécuriser le passage pour les prochaines cordées…

Autant d’efforts sont célébrés par une mini gorgée de génépi et moi qui ne buvait jamais, je trouve le goût bien meilleur en altitude ! En redescendant, l’attention se relâche un peu et boum ! Me voilà qui glisse sur la neige donc vite : je plante le piolet comme on m’avait montré et je remonte sur mes crampons 10 mètres plus bas en faisant cette fois bien attention ! La redescente vers le refuge du Glacier est l’occasion de dernières glissades sur des pentes douces enneigées où certains sont tellement à l’aise qu’ils skient sans ski. Une ultime bière en altitude prolonge un peu le sentiment sympa d’avoir partagé quelque chose de fort : un dépassement de soi pour les novices, un partage de leur expertise pour les meilleurs qui montent en tête et une semaine inoubliable dans des panoramas grandioses. Alors en conclusion que dire ? MERCI ! Merci au CAF 88 ! Merci à Gilles Dangin qui m’a initiée à Saint Amé ! Merci à Alain et Isabelle pour leur investissement des mois en amont pour organiser tout cela, la formation escalade, l’intendance ! Merci à tous pour les mots d’encouragements et les conseils précieux … et à bientôt car maintenant que j’y ai pris goût, j’espère bien pouvoir revenir en 2016 !

Cécile SIMONIN


Photos de Caroline




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Photos de Gérard




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Photos de Rémi G.




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Photos de Pascal




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Photos de Rémi R.

En direction du refuge du Sélé

Course à l'Ailefroide Orientale

Traversée glacière Sélé, Dans, Temple Ecrins

Course au Pic Coolidge et descente au pré de Madame Carle par le glacier Noir